dimanche 16 février 2014

42. W16. 6 novembre 1941 Rapport du commissaire Delgay à l'IGSP

Archives des Cinquante Otages de Nantes (1941)
6 novembre 1941
Rapport du commissaire Delgay à l’Inspecteur général des services de police


Classement







Je transcris ci-dessous un document des Archives départementales de Loire-Atlantique.
Référence :
Fonds 1694 W Affaires de guerre
Dossier 16 : attentat du 20 octobre 1941.

Les astérisques renvoient à des notes (sous la transcription)


TRANSCRIPTION
Dactylographie

« 
MINISTERE DE L’INTERIEUR                                                        ETAT FRANCAIS
Direction Générale
de la Police Nationale
Police Judiciaire                                                        Nantes le 6 Novembre 1941

Homicide sur la personne du Lieutenant Colonel
HOTZ, Feldkommandant de la Place de
                        Nantes

                         Le Commissaire Divisionnaire,  
                         Chef de la Ière Brigade de Police Judiciaire 
                                            à Paris,
                          en mission à Nantes
                                                             à
                          Monsieur l’Inspecteur Général
                          des Services de Police Judiciaire à VICHY


Comme suite à mon rapport en date du 4 courant relatif à
l’information judiciaire suivie contre X du chef d’homicide
volontaire, avec préméditation sur la personne de M. le  Lieutenant
Colonel HOTZ, Feldkommandant de Nantes, j’ai l’honneur de vous
faire connaître les résultats de l’enquête que je poursuis actuellement
avec la collaboration de M. LE PAGE, Commissaire Principal
Chef de la 13ème Brigade de Police Judiciaire à Rennes, assisté
des commissaires PITTON et SOUTIF et de plusieurs inspecteurs de
ce service.

Le Magistrat instructeur a, sur ma demande, établi une
nouvelle commission rogatoire que j’ai expédiée le soir même à
mon service à Paris pour permettre au Commissaire de Police
VILCHIEN de continuer l’audition de plusieurs témoins arrêtés à
Paris, faisant partie de l’organisation des jeunesses communistes.

J’ai reçu, hier matin, et aujourd’hui, plusieurs procès-verbaux
établis par ce commissaire. Il s’agit d’abord de l’audition du
nommé HA Roger arrêté, lequel a précisé avoir eu, le mardi 21
Octobre, vers 22 heures une entrevue avec BRUSTLEIN Gilbert qui
paraissait venir directement de Nantes ; il était vêtu d’un costume
marron, de chaussures basses, de couleur foncée, à semelles épaisses,
d’un pardessus à martingale de couleur marron foncé et coiffé
d’un chapeau mou marron ; il portait à la main une grande serviette
en cuir, usagée, de couleur marron foncé remplie de journaux, de
cartes et de livres. BRUSTLEIN s’est restauré chez les parents
d’HA et, commentant avec celui-ci l’attentat commis à Nantes,
il a fait sous-entendre qu’il était bien possible que ce soit un
 »gars de l’équipe » qui ait fait le coup.

HA ayant demandé à BRUSTLEIN pour quelle raison l’officier
allemand avait été tué, il a répondu que c’était dans le but d’éloigner
les représailles de Paris sur la province.

D’autre part, d’après HA Roger, BRUSTLEIN paraissait très
au courant d’attentats ferroviaires commis récemment dans la
région de Nantes (et) d’Angers.

Feuillet 2

Le père d’HA (HA Yvan) né le 4 avril 1893 à Verviers
(Belgique) de nationalité belge, magasinier en chômage, a été entendu
notamment sur la soirée du 2I Octobre. Il a assisté à la conversation
tenue chez lui entre BRUSTLEIN et son fils Roger. BRUSTLEIN avait
déclaré, parlant de l’attentat de Nantes « que l’homme qui avait fait
le coup avait raté sa première balle mais qu’il avait atteint avec la
seconde l’homme visé », que l’autopsie avait révélé l’usage de balles
allemandes et que, en définitive, ce crime était une exécution de
la Gestapo, que cet officier, domicilié à Nantes, avant la guerre, se
montrait trop accommodant avec les français et qu’il devait disparaître.

Le témoin HA Yvan déclarait qu’il était convaincu que Gilbert
BRUSTLEIN n’était pas étranger au crime commis à Nantes.

Le nommé ZALKINOW, dit BENOIT, arrêté a été entendu. Il a affirmé
que Gilbert (BRUSTLEIN) depuis son retour de Nantes, était bien en
possession de deux pistolets automatiques 6 m/l 35 ; il avait reçu_
l’un d’eux de Gilbert et cette arme avait été saisie sur lui, lors de
son arrestation à Paris. Il croit que BRUSTLEIN a gardé l’autre pistolet
sur lui.

Il est à noter que le pistolet automatique saisi sur ZA et
dont BRUSTLEIN était porteur lors de son séjour à Nantes, est un browning
6 m/m de marque F.N. (fabrique nationale d’armes de guerre Herstal
(Belgique) portant le numéro 397.7II..

Quant au nommé PELTIER ( ????) Robert, Emile, né le 9 Octobre 1921 à
Paris (10°), modeleur mécanicien domicilié 3 rue Danton à Goussainville
(S&O),  arrêté le samedi Ier Novembre par mon service, il a été entendu
longuement.

C’est vers la mi-juillet 1941 que BRUSTLEIN Gilbert l’incorporait
dans la nouvelle organisation des jeunesses communistes dite « les
bataillons de la jeunesse » ayant pour but de lutter, par tous les
moyens, contre l’armée d’occupation en lui créant des difficultés
de tous ordres. Il faisait partie d’un groupe de 3 de la section
Paris Nord.

PELTIER a fourni l’indication ci-après qui présente un certain
intérêt pour l’affaire en cours ; BRUSTLEIN l’avait pressenti pour
« tirer sur les membres de l’armée allemande », mais il avait refusé
catégoriquement.

A Nantes, je  fais poursuivre activement les investigations
dans tous les meublés ou garnis, même ceux non déclarés, aux fins
d’établir les conditions dans lesquelles BRUSTLEIN a logé dans cette
ville. Ce travail très laborieux, effectué par les inspecteurs de
la sûreté de Nantes, est encore en cours d’exécution. Toutes les
identités de voyageurs de passage à Nantes, entre le 5 et le 21
Octobre inclus sont relevées, les résultats sont exploités au fur
et à) mesure par des sondages au fichier des garnis, en utilisant un
spécimen d’écriture du nommé BRUSTLEIN Gilbert.

Un premier résultat a été obtenu, la concierge d’un petit meublé
sis 18 rue d’Alger, a reconnu dans la photo de BRUSTLEIN un individu
(qui) entre le 10 et le 15 Octobre dernier était venu pour louer une chambre
mais il n’y avait pas alors de chambre disponible. Cette visite semble indiquer que BRUSTLEIN désirait bien loger dans un meublé.

Dans la soirée de mardi 4 courant, une vérification faite dans
un hôtel sis 2 rue de Plaisance, quartier de Chantenay à Nantes,
nous apprenait qu’un individu répondant point par point au signalement
cu compagnon de BRUSTLEIN était inscrit comme locataire de cet hôtel
sous l’état-civil ci-après : PANTALEON Léon, né le 29 Septembre 1922
à Chantenay, aide cisailleur. J’ai fait organiser, dès 21 h 30

Feuillet 3

une surveillance par M. Le Pennec, chef de la sûreté assisté
d’inspecteurs de la 13ème brigade de Police Judiciaire et
d’inspecteurs de la sûreté. Une perquisition effectuée dans la
chambre de PANTALEON a fait découvrir une jeune femme, la nommée
BOSSARD Hélène, épouse Billy, née le 1er Mars 1921 à Nantes
qui a été aussitôt gardée à vue.

A 0 H 40 le sieur PANTALEON a été appréhendé et conduit
au Commissariat central. Fouillé à corps, il a été trouvé porteur
du révolver à barillet, arme française, du calibre de 8 m/m
n° 2.422, non chargé.

PANTALEON a été confronté avec Mme H..., restauratrice, ...
... à Nantes, dont le témoignage nous avait permis
d’établir le passage de BRUSTLEIN et de son compagnon en cette ville.
Ce témoin n’a pas reconnu en PANTALEON le compagnon de BRUSTLEIN.

Le Sieur PANTALEON arrêté, a été remis à la Feldgendarmerie,
conformément aux ordonnances de l’armée d’occupation.

J’ai étendu les recherches concernant le passage possible
de BRUSTLEIN, courant Octobre dernier, à plusieurs villes de la
région nantaise : Ancenis, Segré, Savenay, Paimboeuf et St Nazaire
ainsi qu’à Angers.

                                                             Le Commissaire Divisionnaire

Autorités informées :
M. le Conseiller d’Etat, Secrétaire Général pour la
Police à Vichy
M. le Préfet Délégué du Secrétaire Général pour la
Police en territoire occupé à Paris
M. le Procureur Général près la Cour d’Appel de Rennes
M. l’Inspecteur Général des services de police judiciaire
à Vichy
M. le Juge d’instruction BERTHIAU à Nantes
M. le Préfet de la Loire Inférieure
M. le Contrôleur Général BUFFET, en mission à BORDEAUX
M. le Commissaire Principal DELRIEU f.f. de chef de
la Ière Brigade de Police Judiciaire à Paris. »

Notes



































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